Êtes-vous atteinte de « désoladdiction » ? Il s’agit de la manie de s’excuser pour tout, et surtout pour rien. « Oh pardon » quand on vous marche sur le pied, « désolée, c’est trop cuit » quand on a passé deux plombes à cuisiner pour ses proches, « c’est ma faute » quand l’imprimante du service plante, « je suis consternée » quand un proviseur vous apprend que votre enfant a encore eu 5 en maths, etc. D’après une étude de « Psychological Science » relayée par le « Huffington Post », des chercheurs canadiens ont établi que le mal serait principalement féminin. Et il serait si répandu et si nuisible pour la carrière des femmes – à force de les entendre battre leur coulpe pour des choses dont elles ne sont pas coupables, leurs collègues finiraient par se dire « et si elles n’étaient pas trop polies mais juste trop cruches ? » – qu’une série d’outils anti-contrition a été mise au point : le plug-in Gmail Just Not Sorry, qui souligne les abus d’excuses dans les mails que vous êtes en train de rédiger, cartonne aux États-Unis et en France.
Ne plus s’excuser de rien pendant trois semaines serait la façon la plus radicale de se débarrasser de nos tics langagiers. Mais si on craque, que faire ? Doit-on demander pardon d’avoir demandé pardon ? Et si oui, à qui ? C’est vertigineux. On sourit mais on est quand même tenté de se poser la question autrement. Et si le problème n’était pas tant que les femmes s’excusent trop, mais que certains hommes ne s’excusent pas assez ? Après tout, quand elle est justifiée, la contrition est utile. Plutôt que charger le PS de faire le sale boulot, est-ce que François Hollande n’aurait pas dû demander lui-même pardon à la France de l’avoir laissée s’étriper sur la déchéance de nationalité pendant quatre mois pour rien ? Et Carlos Tavares, tiens, plutôt que prétendre que si sa rémunération a doublé en 2015, c’est pas sa faute mais le conseil de surveillance de Peugeot qui l’a forcé, il ne ferait pas mieux de baisser les yeux un bon coup ? Et Donald Trump, alors ? Pour l’ensemble de son œuvre, le moment n’est-il pas venu d’enfiler un bon gros cilice qui gratte ? Voilà quelques pas qui seraient géants dans l’histoire de la parité !