Quant au tableau, joyau inestimable du Louvre, il a moins souffert du temps que des restaurateurs. La couleur de son ciel a verdi; le visage, Jadis éblouissant de fraîcheur, a jauni sous le vernis, et certains détails, comme ceux des cils, ont disparu. Cette toile a inspiré des pages enthousiastes à Michelet, Théophile Gautier, Gustave Planche, à George Sand, etc. Les pages de Vasari sont peut-être aussi les plus simples et les plus éloquentes.
C'est sans doute vers la fin de l'année 1501 que la Napolitaine Monna (ou Mona) Lisa, fille d'Antonio di Noldo Gherardini, vint poser dans l'atelier du peintre. Elle était, depuis 1591, mariée à un gentilhomme florentin, Francesco Zanobi del Giocondo, dont le nom, grâce à l'oeuvre de Léonard, allait devenir universellement célèbre. La Joconde ne devait pas encore avoir atteint la trentaine, quand les séances commencèrent; elles s'espacèrent pendant quatre ans. Pour ne pas laisser gagner son modèle par l'ennui, on assure que Léonard, grand amateur de musique lui-même, lui faisait donner des concerts; en tout cas, il n'épargna rien pour parfaire la peinture. Ainsi qu'il l'a noté dans ses manuscrits, il voulut lutter avec la vie et donner l'illusion d'une créature douée de tous les sens : non seulement capable de voir et de toucher, mais encore d'entendre. Par là, d'ailleurs, se vérifie la subtilité d'esprit de léonard de Vinci, en même temps que le récit des intermèdes de musique de chambre prend aspect de vérité.
Tous les contemporains vinrent admirer la Joconde dans l'atelier de Florence, où Léonard était rentré depuis 1500. On y pouvait voir en même temps le carton définitif de la Sainte Anne, aujourd'hui disparu, et probablement même la peinture qui est maintenant au Louvre. Le portrait n'était pas achevé que le maître s'occupait déjà du carton de la Bataille d'Anghiari. Vasari s'est fait l'écho des contemporains :